

Valentin Tonti-Bernard reçoit Delphine Buisson, secrétaire générale du groupement Eurus et fondatrice de Lumischool.
Ancienne DAF devenue dirigeante, elle accompagne depuis plusieurs années les cabinets d’expertise comptable dans leur transformation stratégique et opérationnelle : structuration de l’offre, gouvernance, organisation, productivité et posture du dirigeant.
Son credo est simple : pour transformer durablement un cabinet, il faut redonner toute sa place au métier de dirigeant. Clarifier la vision, prendre des décisions et s’assurer de leur exécution.
Au sein d’Eurus, Delphine évolue dans un écosystème entrepreneurial unique.
Le groupement fédère plus de 40 structures mères, 300 sites et environ 6 000 collaborateurs. Sa force : conjuguer l’indépendance des cabinets et la puissance du collectif.
« Eurus, c’est un laboratoire d’idées et d’initiatives. On y partage des outils, des pratiques et des expériences concrètes pour faire grandir les structures membres. »
Les cabinets y trouvent à la fois des ressources (universités métiers, formations management et RH) et un cadre propice à la prise de recul stratégique. L’objectif : aider les dirigeants à penser et piloter leur entreprise comme un véritable acteur économique, et non plus seulement comme un producteur de missions.
Avec Lumischool, Delphine accompagne les dirigeants et leurs équipes dans la réécriture des offres de services.
C’est souvent là que se joue la bascule entre un cabinet subissant son organisation et un cabinet qui la maîtrise.
« Tant que l’offre n’est pas claire, tout le reste est flou : la production, le management, la facturation et même la communication. »
Lumischool aide à formaliser ce que le cabinet vend, à qui et comment. Les bénéfices sont multiples : une meilleure rentabilité, un discours plus cohérent et une capacité renforcée à piloter la performance.
Repenser son offre, c’est bien plus qu’un exercice marketing. C’est un outil de management.
Cela permet à chaque collaborateur de comprendre :
« Clarifier l’offre, c’est réconcilier le business, le management et la communication. »
Delphine insiste sur un point essentiel : la clarté de l’offre conditionne directement la marge et la motivation des équipes.
Elle invite les cabinets à travailler sur la segmentation, les livrables, la tarification, la distribution et le suivi client.
Une offre lisible renforce aussi la marque employeur : les collaborateurs savent à quoi ils contribuent, et les clients perçoivent mieux la valeur du travail réalisé.
C’est la base d’un cabinet qui grandit sans se disperser.
La facture électronique est souvent vécue comme un impératif réglementaire.
Pour Delphine, c’est au contraire un formidable levier d’organisation et de productivité.
« Consacrer deux à quatre heures à revoir chaque dossier client, c’est gagner plusieurs mois de sérénité ensuite. »
Cette revue des dossiers permet d’identifier les doublons, d’ajuster les workflows et d’impliquer les clients dans leur propre transition.
C’est aussi l’occasion de repenser la relation client sous l’angle du succès plutôt que du simple suivi.
Les cabinets qui structurent sérieusement l’onboarding client observent des gains de productivité allant jusqu’à 30 %.
Moins d’allers-retours, une meilleure qualité de données, une communication plus fluide : l’impact est immédiat sur le bien-être interne comme sur la satisfaction client.
Delphine met en avant une fonction encore peu répandue mais décisive : le Tech CSM (Customer Success Manager technique).
Son rôle ?
« Le Tech CSM, c’est celui qui transforme les outils en valeur. »
Cette fonction, à mi-chemin entre le support, la gestion de projet et le conseil, devient essentielle dans un environnement où les outils se multiplient.
Delphine partage un ratio de référence : 1 Tech CSM pour 20 collaborateurs.
Et précise : ce poste doit être facturé.
L’accompagnement technologique n’est plus un coût caché, mais un service à forte valeur ajoutée.
Dans de nombreux cabinets, les dirigeants sont happés par la production quotidienne : supervision, signatures, gestion interne, recrutement…
Delphine observe une perte de sens et d’efficacité :
« Quand le dirigeant produit, il ne dirige plus. »
Elle plaide pour une séparation claire entre production, management et direction.
Être dirigeant, c’est trois choses :
Pour renforcer la cohérence dans la durée, Delphine propose un outil de gouvernance qu’elle appelle la banque de décisions.
Il s’agit d’un registre (souvent un tableau collaboratif) qui recense :
Ce suivi rend visibles les arbitrages et évite les oublis. Il professionnalise la gouvernance et ancre la culture du résultat.
Delphine remet la croissance organique au cœur du modèle.
Dans un secteur où la croissance externe attire souvent la lumière, elle rappelle que la valeur se construit d’abord de l’intérieur.
« La croissance organique est magnifique : c’est faire grandir ce qu’on a planté. »
Un cabinet solide est un cabinet qui :
C’est ce socle qui permet ensuite de réussir un rachat ou une association.
La croissance externe peut être un accélérateur, mais elle amplifie les problèmes non résolus.
Avant de racheter, il faut maîtriser ses process, sa gouvernance et son modèle économique.
La croissance saine vient d’un équilibre entre expansion et consolidation.
Une offre structurée, packagée, lisible : base de la rentabilité et de la sérénité managériale.
2 à 4 heures par dossier suffisent pour fiabiliser les flux, réduire les erreurs et améliorer la productivité.
Le Tech CSM ou les référents outils deviennent essentiels dans un cabinet moderne.
Vision, décision, exécution : trois verbes simples, mais exigeants.
Une banque de décisions et des rituels clairs évitent la dispersion.
Avant d’élargir, consolider. Avant de racheter, clarifier.
Delphine Buisson incarne une génération de dirigeants qui veulent réconcilier efficacité, lucidité et humanité.
Avec Eurus et Lumischool, elle accompagne une profession en pleine mutation vers plus de clarté, de valeur et de gouvernance.
« Le futur des cabinets, ce n’est pas d’être plus gros, c’est d’être plus clairs. »
Diriger, c’est un métier à part entière.
Et pour Delphine Buisson, c’est même le plus beau : celui qui transforme la vision en impact.


